Le cancer du sein c’est durant Octobre Rose, mais aussi tout le reste de l’année.
Créative au sens large du terme, Anaïs Verspan, artiste guadeloupéenne indépendante, puise son inspiration dans notre société et notre culture. Sans limites, elle explore la mode, la peinture, la performance.
Atteinte du cancer du sein, elle témoigne.
Pourrais-tu nous expliquer ton parcours ? Par quoi as-tu commencé ?
J’ai toujours été une enfant créative. Le dessin a été ma première façon de communiquer. J’ai d’abord effectué un cursus Littéraire Option Art au lycée pour après poursuivre un cursus artistique en Martinique. En 2006, j’ai créé AfroExcentric, un showroom de mode qui mélangeait le style créole, africain et urbain. C’est en 2013 que je décide de créer mon propre modèle d’artiste pour après le devenir.
Tu as été touchée par le cancer du sein. Peux-tu nous en parler et nous raconter comment tu l’as vécu ?
En 2016, jeune maman, j’allaitais et j’ai senti une boule dans mon sein qu’il soit rempli ou non. Tu sens au fond de toi qu’il y a quelque chose qui ne va pas. On m’a diagnostiqué un cancer de mutation
BRCA2 causé majoritairement par les perturbateurs endocriniens. Dans mes gènes, on a reconnu le cancer du sein et le cancer de l’utérus. J’ai retiré l’autre sein par prévention puis j’ai fait une thrombose. A la suite de cela, j’ai commencé à suivre une thérapie ciblée : j’ai 7 médicaments à prendre tous les jours avec tous les effets secondaires qui s’en suivent.
Avoir le cancer du sein, c’est vivre la féminité en dehors de tout diktat de la société. Entre cache-tétons pailletés, en forme de coeur, en tissu africain… Suite à sa mastectomie, Anaïs les collectionne. Elle sublime ce corps couvert de cicatrices, se le réapproprie et devient sa liberté créatrice. Elle ne se cache plus derrière une oeuvre, elle se met en scène.
Était-ce une maladie inconnue pour toi ou avais-tu des connaissances sur le sujet ?
On a toujours un membre de la famille, une tante qui a eu le cancer mais c’est lorsque tu es touchée que tu prends vraiment conscience.
Quelles sont les principales difficultés que tu as rencontrées ?
J’ai toujours été malade très jeune donc je me suis habituée à m’adapter et avancer. Ce qui est assez particulier, c’est professionnellement parlant. On se met à parler à ta place, à penser pour toi. « Elle est malade, elle a un cancer c’est pas la peine. ». On t’écarte et tu es obligée de travailler plus dur pour montrer ton envie et tes créations. Avoir des projets c’est ce qui te maintient en vie et on te l’ôte parce que tu es malade. Une maladie ne peut pas définir quelqu’un.
Ton cancer du sein a-t-il rejailli sur ton art ?
Je continue de m’ouvrir à de multiples thématiques. Je ne reste pas focalisée sur une en particulier. Néanmoins, je guide des projets artistiques avec l’association Amazone.
Que t’inspire Octobre Rose ?
Octobre Rose est une fête. Tous les jours, il y a des gens qui apprennent qu’ils ont le cancer, qui en meurent et Octobre Rose c’est le moment où on le crie haut et fort. Il faudrait une vraie sensibilisation et prévention dès le plus jeune âge, informer sur les mutations génétiques et surtout vulgariser cette maladie afin que la palpation devienne un geste quotidien.